Intempérie, Jesús Carrasco

C’est amusant, parfois, de découvrir pourquoi tel roman est souvent comparé à un tel autre.

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Intempérie de l’espagnol Jesús Carrasco est présenté par Le Figaro comme proche du fameux La Route de Cormac McCarty. Je veux bien admettre quelques similitudes, comme la présence d’un enfant et d’un homme solitaire dans un monde hostile, mais la comparaison s’arrête là (si vous n’avez pas lu La Route, mettez-vous-y fissa. Qu’est-ce que vous attendez ?)

Intempérie se situe dans une Espagne desséchée. Qu’il se déroule dans les années 30 ou dans un avenir calciné par le réchauffement climatique et le dérèglement du climat ne change rien. Le roman conte la fuite d’un garçon, loin de sa famille et de son village, et sa quête de salut malgré les poursuites, la peur et l’hostilité de la campagne. Il s’agit d’un récit initiatique recouvert de pensées philosophiques plutôt pessimistes et de valeurs négatives surprenantes. Au cœur du récit : le pouvoir concédé par l’autorité qui rend fous les hommes qui l’exercent. Ou plutôt, qui les rend sûrs de leur toute-puissance et de leur immunité, sans cesse confirmée par le silence résigné de leurs administrés.

Carrasco parle de violence, de colère, d’émotions, de traumatismes et de blessures psychologiques autant que de soif, de faim, de blessures physiques infligées par l’environnement ou par les hommes.

Sans être sans intérêt, ces propos ne sont pas non plus extrêmement originaux. Mais ils sont écrits avec un style particulier, puissant, évocateur, parfois cru qui leur donne un nouvel éclairage. Beaucoup de choses sont évidentes sans être clairement exposées, d’autres, comme le passé des personnages secondaires, sont à peine esquissées. Le parti pris de ne pas nommer les personnages est audacieux, et plutôt réussi : il n’empêche pas de les comprendre et, dans une certaine mesure, de s’identifier à eux.

Dans l’ensemble, Intempérie est un roman plutôt contemplatif, à l’intrigue linéaire, sans vraiment de rebondissements. L’auteur prend même soin de volontairement prévenir le lecteur pour désamorcer la possible surprise des derniers chapitres. Cela n’enlève rien à la tension et à l’ambiance du récit. Tous les fils sont en place, le tisserand les tend lentement, étrangle les personnages dans un destin programmé.

Comme dans une tragédie antique.

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Le roman est paru chez 10-18: http://www.laffont.fr/site/intemperie_&100&9782221156100.html

Carrasco, Jesús (2017). Intempérie. Paris : Robert Laffont (collection 10-18), 216p.

2 réflexions sur “Intempérie, Jesús Carrasco

  1. envolee92 dit :

    Ce côté très linéaire de l’intrigue est précisément ce qui m’a ennuyée, j’ai eu beaucoup de mal à arriver au bout de ce roman qui n’est pourtant pas bien long… La relation entre les personnages m’a touchée mais les réflexions mises en place m’ont parfois semblé « faciles ». Bref, ce n’est pas un roman qui restera gravé dans ma mémoire !

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